#Santé publique

Fin de vie : François Hollande annonce un droit à la sédation profonde et à l’arrêt des traitements

Le président François Hollande a reçu, vendredi 12 décembre, un rapport sur la fin de vie et une proposition de loi élaborés par les députés Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP).

Ces derniers soulignent les inégalités actuelles des citoyens face à la souffrance et l’insuffisance persistance de l'approche palliative en France.

Leur proposition de loi, qui devrait être débattue au Parlement début 2015, prévoit un renforcement des dispositions de la loi de 2005, avec en particulier la création d’un droit à l'arrêt des traitements, à une sédation profonde en phase terminale et une obligation de respect des directives anticipées.
12 décembre 2014 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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François Hollande, Alain Claeys, Jean Leonetti, Marisol Touraine et Manuel Valls, le 12 décembre à l'Elysée.

François Hollande, Alain Claeys, Jean Leonetti, Marisol Touraine et Manuel Valls, le 12 décembre à l'Elysée.


La douleur, la souffrance et la fin de vie sont encore insuffisamment prises en charge malgré la loi Leonetti
En octobre dernier, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE), saisi par le Président de la République, dénonçait "le scandale que constitue, depuis 15 ans, le non accès aux droits reconnus par la loi", en particulier les inégalités d'accès aux soins palliatifs (voir notre article sur le rapport du CCNE et ses préconisations).

Alain Claeys et Jean Leonetti, auteur de la loi de 2005, déplorent également, dans leur rapport, ces insuffisances : malgré un nombre d'unités de soins palliatifs en augmentation, seuls 51 % des patients atteints d'un cancer en bénéficient, et moins d'un quart des patients atteints d'une maladie cardiovasculaire ou respiratoire (source : étude Ined, 2012).

Les deux députés regrettent aussi le cloisonnement délétère entre le curatif et le palliatif, méthode de soins qui ne devrait pas être uniquement cantonnée à la fin de vie. Ils soulignent l'insuffisance de la formation des médecins aux soins palliatifs, qui devraient permettre de soulager et accompagner tous les patients souffrants dès que nécessaire, sans attendre la fin de vie.

Ces insuffisances, persistantes malgré la loi Leonetti, ainsi que d'encore trop fréquentes "obstinations déraisonnables" (traitements disproportionnés, inadaptés), conduisent encore beaucoup trop fréquemment à un "mal mourir". De même que la mort dans un service d'urgences lorsqu'une personne exprime le souhait de mourir à son domicile est difficilement acceptable... 

Renforcer la lutte contre l'"obstination déraisonnable"
Face à ce constat, et en s'appuyant sur le rapport du CCNE et les rapports précédents, Alain Claeys et Jean Leonetti préconisent plusieurs évolutions législatives. Leur proposition de loi est accessible dans leur rapport, pages 24-30.

Cette proposition de loi rappelle que "toute personne a droit à une fin de vie digne et apaisée" (article 1), sans obstination déraisonnable, c'est-à-dire sans mise en œuvre (ou maintien) de traitements visant à maintenir artificiellement la vie, sous réserve d'une volonté exprimée par le patient et de l'avis favorable du collège de professionnels de santé du service. L'article 2 précise que la nutrition et l'hydratation artificielles constituent un traitement.

Instaurer un droit à la sédation profonde et au refus de traitement
L'article 3 de la proposition de loi définit un droit à la sédation profonde, terminale, avec arrêt de l'ensemble des traitements de maintien en vie (y compris, donc, la nutrition et l'hydratation).

Ce droit sera accessible  "à la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas prolonger inutilement sa vie" et mis en œuvre dans les cas suivants :
- lorsque le patient atteint d'une affection grave et incurable dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire au traitement ;
- lorsque la décision du patient, atteint d'une affection grave et incurable, d'arrêter un traitement, engage son pronostic vital à court terme.

Lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et dans le cadre du refus de l'obstination déraisonnable, dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie, le médecin pourra lui administrer cette sédation profonde et terminale.

L'article 5 prévoit également que "toute personne a le droit de refuser ou de ne pas subir tout traitement", après avoir été informé des conséquences de ses choix et leur gravité par les professionnels de santé. Si cette décision d'arrêt du traitement met la vie du patient en danger, l'article 5 prévoit que cette volonté d'arrêt soit réitérée "dans un délai raisonnable".

Vers une facilitation de la rédaction  des directives anticipées et une obligation de leur respect par le corps médical
La possibilité laissée à toute personne majeure de rédiger des directives anticipées est encore mal connue. De plus ces directives, lorsqu'elles ont été émises, sont encore insuffisamment respectées par les médecins, qui ont souvent le dernier mot.

 Afin de corriger cette situation, l'article 8 du projet de loi prévoit de mieux informer les patients sur cette possibilité, de simplifier et généraliser leur rédaction. Elles seront inscrites sur sa Carte vitale afin d'être immédiatement accessibles par le médecin et seront révisables à tout moment. Le délai actuel de validité (3 ans) sera supprimé, ce qui évitera de les réécrire tous les 3 ans..

L'article 8 précise aussi précise que ces directives "s'imposent au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement", sauf en cas d'urgence vitale, le temps d'évaluer complètement la situation.

Cette obligation de respect des directives anticipées ne sera cependant pas applicable si les directives "sont manifestement inappropriées". Dans ce cas, le médecin pourra être "délié de cette obligation de respect" en consultant au moins un confrère et en motivant sa décision.

Pour François Hollande, une telle évolution législative va permettre de mieux gérer la fin de vie
Pour François Hollande, qui s'était engagé à faire évoluer la loi Leonetti pendant la campagne présidentielle de 2012, le droit à la sédation profonde et l'obligation de respect des directives anticipées constituent "deux avancées majeures" :

[REPORTAGE] Remise du rapport sur la fin de vie
Les députés Jean Leonetti et Alain Claeys ont remis au président François Hollande un rapport, accompagné d'une proposition de loi, visant à ouvrir de nouveaux doits aux malades et aux personnes en fin de vie.



Cette proposition de loi devrait être discutée début 2015 en Conseil des ministres puis à l'Assemblée Nationale et au Sénat.
 
En savoir plus :
Rapport de présentation et texte de la proposition de loi de MM. Alain Claeys et Jean Leonetti créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (fichier PDF), décembre 2012
De nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, elysee.fr, 12 décembre 2014
Rapport du CCNE sur le débat public concernant la fin de vie, 23 octobre 2014
Rapport 2013: La fin de vie des personnes âgées, Observatoire national de la fin de vie. 
Les décisions médicales en fin de vie en France, Sophie Pennec, Alain Monnier, Silvia Pontone et Régis Aubry, Ined, octobre 2012

Sur VIDAL.fr :
Fin de vie : après 2 ans de débats et réflexions, le CCNE publie son rapport et dénonce un "scandale" (octobre 2014)
Fin de vie : "c'est une question sociétale qui devrait beaucoup plus mobiliser" Emmanuel Hirsch (octobre 2014)
Fin de vie : la justice et le Conseil d'Etat se prononcent sur deux affaires complexes (juin 2014)
Soins palliatifs et fin de vie : "Je suis plutôt contre une loi sur l'euthanasie", Interview du Dr Christophe Trivalle, gériatre (mai 2014)
Sources

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