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TDAH : comment les médecins français utilisent-ils le méthylphénidate ?

Les données d'utilisation et la sécurité d'emploi du méthylphénidate (RITALINE, RITALINE LP, CONCERTA LP, QUASYM LP et MEDIKINET) en France font l'objet d'un nouvel état des lieux de l'ANSM, 4 ans après la publication du premier rapport sur ce thème.

Il ressort de ces nouvelles données que, malgré l'augmentation continue des ventes, la consommation de méthylphénidate reste faible en France notamment par rapport à d'autres pays comme la Suède ou les Etats-Unis.

Cette substance psychostimulante est principalement utilisé chez les enfants de sexe masculin âgés de 6 à 17 ans dans le traitement du TDAH (trouble déficit de l'attention avec hyperactivité) et majoritairement initiée entre 6 et 11 ans.

Cependant, une utilisation hors AMM du méthylphénidate est observée, notamment en initiation de traitement chez l'adulte, exposant les patients à des effets indésirables graves, notamment cardiovasculaires et cérébrovasculaires

De plus, la réglementation en matière de prescription n'est pas respectée dans un tiers des cas. En effet, bien que la prescription initiale soit réservée aux médecins hospitaliers (pédiatres, psychiatres et neurologues pour le TDAH), 30 % des primo-prescriptions sont encore établies par des médecins libéraux, généralistes ou spécialistes.  
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Le TDAH est caractérisé par des difficultés de concentration qui peuvent s'accompagner ou non d'hyperactivité ou d'impulsivité (illustration).

Le TDAH est caractérisé par des difficultés de concentration qui peuvent s'accompagner ou non d'hyperactivité ou d'impulsivité (illustration).


Nouveau rapport de l'ANSM sur le méthylphénidate en France
Quatre ans après un premier état des lieux sur l'utilisation du méthylphénidate en France (notre article du 18 juillet 2013), l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) publie un rapport actualisé sur cette substance psychostimulante utilisée, selon les spécialités (RITALINE, RITALINE LPCONCERTA LPQUASYM LP et MEDIKINET LM), dans la prise en charge :
 Ce nouveau rapport livre plusieurs enseignements, en termes de consommation, de pratique professionnelle et de sécurité d'emploi.

Une consommation en hausse mais relativement faible
Les données révèlent que les ventes de méthylphénidate ont augmenté de façon continue au cours des dernières années. En France, le nombre de boîtes vendues a été multiplié par 3 entre 2005 et 2014. Dans cet intervalle de 9 ans, il est passé de 220 000 boîtes à 600 000. Cela représentait 48 895 patients traités en 2014. 

Cependant, l'utilisation du méthylphénidate reste faible en France, en comparaison à d'autres pays européens. C'est dans les pays scandinaves (Suède, Norvège et Danemark) que la consommation de méthylphénidate est la plus élevée en Europe. En Suède, le nombre d'utilisateurs continue à progresser, alors qu'on observe une tendance à la baisse aux Etats-Unis, autre pays marqué par une consommation élevée. 
En nombre de DDJ (dose définie journalière) pour 1 000 habitants par jour, la France se situait à 0,43 en 2014, loin derrière la Suède où ce nombre dépasse 9.

Profil des patients : des garçons de 6 à 11 ans traités en moyenne 1,6 an
Trois utilisateurs sur 4 sont de sexe masculin (garçons et hommes).
Les enfants de 6 à 11 ans représentent la population majoritaire, conformément à l'AMM (autorisation de mise sur le marché). On comptabilise un peu moins de 10 000 utilisateurs prévalents adultes (plus de 18 ans). 

La durée médiane de traitement après l'initiation est de 1,6 an.
La durée de traitement est plus longue chez les enfants que chez les adultes : 66,3 % des traitements initiés chez des enfants sont poursuivis au-delà d'une année, contre 27,6 % pour les adultes. Pour 23 % des traitements initiés, une seule délivrance a été enregistrée. 

La réglementation des stupéfiants non respectée dans 1 cas sur 3
Les spécialités de méthyphénidate sont soumises à la réglementation des stupéfiants, qui consiste en :
  • une prescription limitée à 28 jours
  • une prescription initiale hospitalière et annuelle, réservée aux neurologues, psychiatres et pédiatres. Elle est étendue aux centres du sommeil pour RITALINE 10 mg, en raison de son indication dans le traitement de la narcolepsie.
  • un renouvellement qui peut être réalisé par les autres médecins.

Les données montrent cependant que ces modalités de prescription et donc de délivrance ne sont pas respectées dans 30 % des cas. En effet, 1 prescription d'initiation sur 3 est établie par des médecins libéraux, avec une répartition quasi-égale entre généralistes ou spécialistes.

L'ANSM appelle à respecter la réglementation en vigueur, comme elle l'a déjà fait en 2012. Elle souligne également le rôle essentiel des médecins généralistes dans le suivi des patients sous méthylphénidate, bien que ces derniers ne soient pas autorisés à initier un tel traitement.

Une utilisation hors-AMM chez l'adulte et des cas de mésusage
En France, le méthylphénidate n'est pas indiqué en initiation dans le traitement du TDAH chez l'adulte. En revanche, un traitement par méthylphénidate initié à l'adolescence peut être poursuivi à l'âge adulte, si les symptômes persistent et que les bénéfices du traitement sont démontrés.

Le rapport note la persistance d'une pratique hors AMM, consistant en des initiations de traitement par méthylphénidate chez les adultes

Le nombre de cas rapportés est restreint mais cette pratique expose les patients à des effets indésirables graves, notamment une augmentation des risques cardiovasculaires et cérébrovasculaires. En effet, le risque d'événement cardiovasculaire ou cérébrovasculaire chez l'adulte est plus élevé que chez l'enfant compte tenu notamment de la présence de comorbidités et de l'utilisation plus fréquente de traitements associés.

Autre phénomène, le méthylphénidate fait l'objet d'un mésusage. Selon la dernière enquête d'addictovigilance, on observe
entre 2014 et 2015 une augmentation de 30 % du nombre de cas d'abus, notamment avec la RITALINE. La majorité des signalements est enregistrée dans le sud de la France et en l'Ile de France, mais cette pratique tend à se développer dans d'autres territoires de l'hexagone (Bordeaux, Caen, Clermont-Ferrand).

Conclusion : informer et surveiller les patients

L'information des patients reste indispensable, tant pour expliquer les propriétés et les modalités de prise du médicament que pour alerter sur les risques liés à ce type de traitement.

Une brochure d'information conçue en 2013 et actualisée récemment permet d'accompagner le  professionnel de santé, lors de la prescription ou de la dispensation des spécialités à base de méthylphénidate. 


Pour encadrer le risque d'événements indésirables liés à ce stupéfiant, une surveillance doit être mise en oeuvre. Elle doit porter notamment sur les paramètres cardiovasculaires (tension artérielle, fréquence cardiaque) et la croissance staturopondérale. Une réévaluation régulière est nécessaire en raison de l'utilisation habituellement prolongée du méthylphénidate

Pour aller plus loin
Méthylphénidate : données d'utilisation et de sécurité d'emploi en France - Point d'Information (ANSM, 11 mai 2017)

Rapport 2017 : données d'utilisation et de sécurité d'emploi du méthylphénidate en France (ANSM, mai 2017)
Brochure d'information patients : Vous et le traitement du trouble déficit de l'attention/hyperactivité par méthylphénidate (ANSM, 11 mai 2017)
Conduite à tenir en médecine de premier recours devant un enfant ou un adolescent susceptible d'avoir un trouble déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (HAS, décembre 2014)

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